- Éditorial
Je sais...
« J’ai donc étudié, hélas ! la philosophie, le droit, la médecine, et, hélas ! la théologie, avec ardeur et peine ; et voici que je suis, pauvre fou, aussi sage qu’auparavant. » 1
30.05.2025

Nous sommes une société de la connaissance. Le savoir individuel et collectif sert de base à l’organisation de la vie en commun. En effet, le savoir a énormément augmenté dans notre pays et dans le monde entier, et il continue de croître. Mais en même temps, il me semble que la possibilité de savoir quelque chose est de plus en plus remplacée par l’affirmation et l’insistance sur les opinions : « Mon opinion est faite ! Ne m’embrouillez pas avec des faits. »
Les sources d’information sont si nombreuses. Il est bon de vérifier leur sérieux et leur fiabilité. Ces sources vont des informations établies et fiables aux théories du complot, des messages basés sur des faits aux pamphlets démagogiques, et tout se retrouve sans filtre sur le web et dans les médias imprimés avec le sceau « C’est comme ça ! ». Il est donc d’autant plus important de toujours se demander ce qu’il en est de la crédibilité des déclarations, de la fidélité aux faits des contenus.
Or même avec des sources solides, nos connaissances sont fragmentaires et le resteront de notre vivant. On pourrait donc se tourner vers la magie, comme le fait Heinrich Faust dans l’œuvre qui fera date de Goethe : « Il ne me reste désormais qu’à me jeter dans la magie. … si enfin je pouvais connaître tout ce que le monde cache en lui-même... »2 Cela exprime le regard divisé sur le monde auquel nous sommes attachés. Nous appelons « connaissance » les éléments toujours limités avec lesquels nous essayons d’expliquer le visible. Ces éléments doivent être vérifiables, et nous devons nous donner la peine de les vérifier. Celui qui se base sur l’imagination ou l’idéologie affirmera par exemple encore aujourd’hui que la Terre est un disque.
La question de savoir « tout ce que le monde cache en lui-même » est cependant pour moi une question de connaissance. Le savoir dans le sens des éléments mentionnés ci-dessus, ce n’est pas cela. Il va dans le sens de la foi : « Je crois pour comprendre. »3 La foi est quelque chose de très personnel, et je veux laisser à chacun sa foi ressentie. Si j’accepte que mes connaissances sont incomplètes, je ne peux pas non plus prétendre que le peu de connaissances que j'ai est universel. Je ne devrais pas croire savoir ce que je ne peux pas savoir : « Je sais que je ne sais pas ! »4